Cino Zucchi est de cette nouvelle génération d’architectes italiens qui, las du poids de l’histoire, de l’autorité des historiens orthodoxes et autres théoriciens hypocondriaques de la rigueur – en quoi l’Italie fut particulièrement bien servie – s’exerce librement aux compositions architecturales qu’autorise notre époque décomplexée.
Mais ces compositions qui pourraient apparaître au premier regard comme le cédant un peu trop à l’air du temps, mérite que l’on s’y attarde tant elles vont bien au-delà du simple effet de mode.
Si les lignes générales restent le plus souvent rationnelles sur le plan constructif – nous sommes loin des inquiétudes déconstructivistes –, il semble que chaque percement, chaque loggia en retrait, doive s’affranchir de l’ordre par trop systématique d’un alignement a priori, que celui-ci soit vertical ou horizontal. Il y a là une préoccupation qui n’est pas seulement formelle mais poétique, une préoccupation autrement dit liée aux temps et aux usages des vies humaines, à une poétique de l’habiter.
Loin en effet de dissimuler ou de travestir ces simples ouvertures qui sont nécessaires à la vie, cette architecture les magnifie, avec une liberté revendiquée qui ne sombre jamais cependant dans les fantaisies formelles et les vanités de la haute couture si courantes à notre époque. Dans cette architecture, les murs nous parlent des vies humaines, de la même façon qu’une porte, quelques marches, une fenêtre étroite percée dans un haut mur, un simple balcon surplombant la rue d’un ancien village nous parlent des hommes qui vécurent derrière ces murs, leur donnant ainsi une épaisseur qu’aucune masse de béton jamais ne saura reproduire.
Et c’est par le travail des proportions et de la composition que Cino Zucchi parvient à ce tour de force qui consiste à donner à chacun des percements d’une tour de douze étages, un caractère, une individualité particulière. Par ces ouvertures qui semblent toutes avoir une situation (par leur rapport aux autres comme par leur rapport au tout) et un caractère singulier, par la diversité également des rapports que ces ouvertures suggèrent entre l’intérieur et l’extérieur de l’ouvrage, chacun de ses bâtiment vit, d’une vie singulière, et entre en dialogue avec le monde. Tout se passe comme si, au travers des situations urbaines contemporaines, l’architecte était en quête d’une nouvelle urbanité, multiple et vivante, et voulait restaurer cette subtile relation de l’ordre et du désordre qui est l’essence même de toute création, et au cÅ“ur de la vie même, individuelle et collective.
Mais c’est à Venise, ville d’une si dense urbanité, ville de reflets où tout est si proche et inaccessible à la fois, ville où les regards se dissimulent derrières le masque de murs aux apparences presque décorative, et si profondément étrangère à l’architecture de Palladio, que Cino Zucchi manifeste la pleine puissance poétique de son architecture.
Si les lignes générales restent le plus souvent rationnelles sur le plan constructif – nous sommes loin des inquiétudes déconstructivistes –, il semble que chaque percement, chaque loggia en retrait, doive s’affranchir de l’ordre par trop systématique d’un alignement a priori, que celui-ci soit vertical ou horizontal. Il y a là une préoccupation qui n’est pas seulement formelle mais poétique, une préoccupation autrement dit liée aux temps et aux usages des vies humaines, à une poétique de l’habiter.
Loin en effet de dissimuler ou de travestir ces simples ouvertures qui sont nécessaires à la vie, cette architecture les magnifie, avec une liberté revendiquée qui ne sombre jamais cependant dans les fantaisies formelles et les vanités de la haute couture si courantes à notre époque. Dans cette architecture, les murs nous parlent des vies humaines, de la même façon qu’une porte, quelques marches, une fenêtre étroite percée dans un haut mur, un simple balcon surplombant la rue d’un ancien village nous parlent des hommes qui vécurent derrière ces murs, leur donnant ainsi une épaisseur qu’aucune masse de béton jamais ne saura reproduire.
Et c’est par le travail des proportions et de la composition que Cino Zucchi parvient à ce tour de force qui consiste à donner à chacun des percements d’une tour de douze étages, un caractère, une individualité particulière. Par ces ouvertures qui semblent toutes avoir une situation (par leur rapport aux autres comme par leur rapport au tout) et un caractère singulier, par la diversité également des rapports que ces ouvertures suggèrent entre l’intérieur et l’extérieur de l’ouvrage, chacun de ses bâtiment vit, d’une vie singulière, et entre en dialogue avec le monde. Tout se passe comme si, au travers des situations urbaines contemporaines, l’architecte était en quête d’une nouvelle urbanité, multiple et vivante, et voulait restaurer cette subtile relation de l’ordre et du désordre qui est l’essence même de toute création, et au cÅ“ur de la vie même, individuelle et collective.
Mais c’est à Venise, ville d’une si dense urbanité, ville de reflets où tout est si proche et inaccessible à la fois, ville où les regards se dissimulent derrières le masque de murs aux apparences presque décorative, et si profondément étrangère à l’architecture de Palladio, que Cino Zucchi manifeste la pleine puissance poétique de son architecture.
Stéphane Gruet*, le 8 décembre 2009 (Source du texte)
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(*): Stéphane Gruet est architecte et philosophe, fondateur des édition Poïésis.