« Pour la première fois, on reconnaît que la vie de l'Homme, bien ou mal portant, est liée aux forces de la nature, que cette nature ne doit être ni contrariée ni conquise, mais plutôt traitée comme une alliée et une amie dont les cheminements doivent être compris et les conseils suivis.»Lewis Mumford
Nature: N. f. Ce qui, dans l'univers, se produit spontanément, sans intervention de l'Homme (Le Petit Robert).
Ce critère, fortement restrictif, est difficilement applicable dans un milieu soumis à l'action de l'Homme. Par exemple, un champ entouré de bois sera moins perçu comme élément de nature que s'il se trouvait en milieu urbanisé. Ainsi, il sera utile de tenir compte de la relativité de notre perception.
Réseau: N. m. Ensemble [...] de lignes entrelacées ou entrecroisées (Le Petit Robert).
Il peut se caractériser par sa continuité.
Nous appellerons « Plan Réseau Nature » un document d'art urbain mettant en relation les éléments de la nature (eau, air, sol, faune, flore, etc.) et les éléments bâtis pour une entité géographique. Son objet est d'indiquer les améliorations de la qualité du cadre de vie par un ensemble d'actions (de prévention des risques, de réhabilitation, de préservation, de mise en valeur). Pour cela, il compare le diagnostic de l'état existant des potentialités et carences d'un territoire (cours d'eau, bois, etc./décharges, pollutions, etc.) et l'état résultant des actions prioritaires à mettre en œuvre. Ainsi, il se présente en deux cartes suivant le principe « avant/après » à une échelle comprise entre 1/5 000 et 1/25 000.
Au Ier siècle av. J.-C., Vitruve, en citant Alexandre, fait valoir un modèle de ville qui, avec ses campagnes environnantes, forme un système autonome : « Une ville ne peut s'agrandir sans campagne fertile, [...] faire subsister ses habitants sans riches récoltes. »
Jusqu'à la fin du Moyen Âge, le modèle de la cité défendue par des murailles avec la nature cultivée extra-muros perdurera (1).
À la Renaissance, la nature est reconsidérée et magnifiée pour son esthétisme. Dans les parcs royaux, le végétal est alors un décor, une mise en perspective théâtralisante de la puissance royale et de sa gloire.
Au XVIIe siècle, les progrès dans le domaine scientifique (découverte des lois d'op- tique, d'hydraulique, etc.) ont conduit à une artificialisation de la nature. Par l'utilisation des perspectives, des fontaines, de l'art topiaire, de l'illusion d'optique, le jardin à la française illustre bien cette volonté de façonner la nature (2).
À la même période, les murs à pêches de Montreuil ou les murs à raisins de Thomery révèlent un autre lien avec la nature (3). Grâce à l'inertie thermique de murs talochés de plâtre, les arboriculteurs produisaient des fruits hors saison, exploitant au mieux les ressources naturelles. Cette particularité locale conduisit à favoriser l'ex- portation d'une partie de la production.
Début du XIXe siècle, l'insalubrité des villes exemptes d'éléments de nature pous- sèrent les urbanistes à réévaluer le statut du végétal dans la ville sous l'impulsion des théories hygiénistes. Influencé par le modèle londonien, Napoléon III demande à Haussmann et Alphand, l'architecte, de créer dans Paris un système de parcs (4) accompagnant la croissance de l'agglomération. Liant les trois échelles urbaines, l'îlot, le quartier et la ville, ils composèrent un réseau cohérent, constitué de squares, parcs, et bois reliés par des avenues plantées.
De même, vers 1875, F. L. Olmsted réalise un Park System à Boston, l'Emerald Necklace reliant les potentiels de nature existants (lacs, rivières et bois) (5).
Dans les années soixante, apparaît le mouvement écologiste. La publication de Composer avec la nature de l'architecte paysagiste Mac Harg, précurseur de la planification écologique, signale que « les atteintes à la nature sont à limiter, mieux, les projets doivent, à leur manière, entrer dans l'évolution millénaire du monde au lieu de la contrarier, sous peine des sanctions les plus graves ». Dans ses travaux, par la compréhension des cycles de la nature, par l'utilisation de méthodes multicritères, il cherchera à définir l'aptitude des territoires à accepter l'urbanisation (8).
Comme pour les systèmes de parcs, la création d'un réseau est une solution permettant une réintroduction de la nature en ville trouvant son intérêt dans les relations et la synergie entre les éléments. C’est une approche systémique obligeant à aborder les éléments de nature comme un tout. Ainsi, cette approche a pour but de favoriser la biodiversité, la prévention des risques natu- rels, la mise en valeur de la nature, de même que l'archi- tecture et la vie sociale.
Cette réflexion s'est développée au cours des dernières décennies et s'observe à travers les politiques publi- ques en France :
-1976. Premières études d'impact sur l'environnement (EIE) (7). Une carte de patrimoine s'attache à répertorier différents types d'éléments de nature pouvant faire l'objet d'une protection réglementaire.
-1983. Les « plans verts », déclinés de l'échelle communale (6) à l'échelle régionale, s'intéressent à tous les espaces libres. Les thèmes développés sont le paysage, les pratiques urbaines, l'écologie, etc. La plupart ont pour objectif d'accroître le capital vert des villes, de réduire les inégalités d'accessibilité à la nature, d'établir un réseau de liaison entre les espaces de nature (9). Ils sont considérés comme documents de référence pour la programmation et l'attribution de subventions...
-1994. Plan de paysage (V. fiche du Vocabulaire).
Aujourd'hui, la notion de « trame verte et bleue » ressortant du Grenelle de l'environnement (2007) a pour objet la construction d'un réseau écologique avec les acteurs locaux, pour un remaillage cohérent et pertinent du territoire. Il est élaboré sur une « base contractuelle » (10).
Pour le Séminaire Robert Auzelle, cette démarche, pour vertueuse qu'elle soit, n'est pas suffisante. Le Plan Réseau Nature a pour ambition de concilier dans une seule démarche les impératifs écologiques au regard d'un aménagement qualitatif. Les petites villes (moins de vingt mille habitants) et territoires intercommunaux concernés, possédant encore de forte potentialité de nature, peuvent être vus comme alternatives au développement des grandes agglomérations. Il s'agit donc de « programmer une organisation de l'espace conforme aux aptitudes du milieu au regard des usages de l'Homme » (Mac Harg). Il faut que les maîtres d'ouvrages, avec le concours des écologistes, des paysagistes, des urbanistes, des aménageurs, des architectes et des ingénieurs, composent avec la nature dès la programmation d'un projet d'intérêt local (équipement public culturel, social, sportif, lotissement d'habitation, industriel, équipement routier, etc.).
V. ÉTUDE D'IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT, PLAN DE PAYSAGE, SQUARE, TRAME FONCIÈRE.
Source: Arturbain.fr
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