Voies Urbaines: Définition de l'Art Urbain

La rédaction
« Le point de départ comme le point d'arrivée de toutes les voies est toujours l'habitation ou la demeure de l'Homme. La communication entre ces deux points extrêmes n'est généralement pas directe et elle doit s'effectuer par des voies intermédiaires. Un système de voies ressemble à un bassin fluvial. Les sources forment des ruisseaux qui affluent vers des torrents. Ceux-ci débouchent dans les rivières qui, à leur tour, se jettent dans le fleuve qui mènera toutes ces eaux à la mer. De même, l'Homme sort de sa maison en empruntant un sentier qui le conduit à un chemin qui débouche sur un chemin vicinal. Celui-ci mène à une route départementale, puis nationale, et ainsi de suite, jusqu'au rivage de la mer où les différentes voies se disperseront sur cet élément navigable en toutes directions pour desservir les divers points du globe. »
I. Cerda

Voies Urbaines: Du latin via, « voie », et urbanus, « de (la) ville ».
Espace à parcourir pour aller quelque part. Voies urbaines, à l'intérieur d'une agglomération (rue, avenue, boulevard, etc.). Voies express, à circulation rapide, dans les villes. Les voies sur berges, à Paris.

D'une manière générale, la voie publique est "tout espace du domaine public destiné à la circulation (voies proprement dites, places, etc.) dans les villes. […]. Partie d'une route de la largeur d'un véhicule. Route à trois, quatre voies » (Le Robert).

Dès l'époque grecque, à travers les cités-États, coexistent deux modèles d'organisation, le plan libre (Pergame) et le plan orthonormé (Milet) (1). Ce dernier, datant du Ve siècle av. J.-C., se fonde sur un plan en échiquier. Son découpage perpendiculaire délimite les insulæ rectangulaires permettant une lecture claire et symbolique de l'espace. À la même époque, les Romains s'inspirent des principes grecs. L'organisation viaire découvre une place centrale au croisement de l'axe est/ouest (decumanus) et nord/sud (cardo). Les voies sont réglementées selon leur usage. Les itinera désignent les rues pour piétons, l'actus sert pour le passage d'un char et la via, pour celui de deux chars. Leur largeur varie de 4 à 8 m avec une exception de 32 m pour la Via Noua de Rome. Déjà, les rues sont dallées et bordées de trottoirs. Aoste révèle une persistance de la trame viaire romaine jusqu'à nos jours (2).
La planification isotropique est abandonnée dans les villes chrétiennes du Moyen Âge. Elles s'organisent autour d'un lieu de culte ou d'un château fort protecteur suivant un plan circulaire. Délimité par des enceintes, l'espace urbain se compose de voies très étroites et irrégulières, comme l'illustre la cité de Brive (3).
Au XVIIe siècle, on assiste à l'élargissement des artères principales grâce au principe de l'expropriation immédiate. Suivant une politique d'unification, les dimensions sont normalisées. Le plan officiel des rues de Paris de Verniquet permet d'établir trois classes de voies : 10 m et plus, de 8 à 10 m et moins de 8 m. Parallèlement, la hauteur des bâtiments est définie. Sous le Directoire, un arrêté codifie les dimensions des rues entre 14 m et 6 m.

Durant la révolution industrielle, 95 % du système viaire français est mis en place entre 1836 et 1886. La voirie parisienne sert de modèle. Rambuteau (1833-1848) applique, sous la Restauration, les premiers plans d'alignement en perçant et élargissant certains axes. La voie urbaine est traitée comme un équipement. Une partition horizontale (les chaussées et les trottoirs) et verticale (sol et sous-sol) est implantée. 
Haussmann (1853-1870) impose un plan d'ensemble systématique de la voirie urbaine pour répondre aux problèmes d'encombrements dus à la circulation. L'art de la voirie codifie l'espace urbain et son paysage. La rue est traitée comme une composition (profil bombé, revêtement, trottoirs et caniveaux). Le boulevard et l'avenue déterminent une nouvelle typologie de voies urbaines (8/9).

Les villes américaines quant à elles sont planifiées suivant le modèle de la trame de Jefferson (Jefferson's Ordinance) qui définit un quadrillage rectiligne strict (7).

Cerda (1815-1876) propose sa « teoria » fondée sur un urbanisme de réseaux précurseur des doctrines du Mouvement moderne. Son approche fonctionnaliste, la première, différencie l'espace du mouvement (la voirie) de celui du séjour (les îlots) suivant le concept de « viabilité universelle », comme le montre le plan de Barcelone (4). La ville se compose d'un système de voies orthogonales formant les carrefours traités en pans coupés et percées de voies diagonales. Les voies particulières sont réservées à l'accès aux lotissements.
Ebenezer Howard (1850- 1928) publie en 1899 le concept des cités-jardins satellites en Angleterre. Leur plan théorique partant d'un rond-point central suit un schéma radioconcentrique avec une hiérarchisation des voies (6).

Les CIAM approfondissent la logique de la spécialisation. En 1933, Le Corbusier présente, au congrès d'Athènes, sa théorie de « la ville fonctionnelle ». Le système viaire est requalifié selon la vitesse et hiérarchisé suivant trois fonctions fondamentales : l'habitat, le travail et le loisir. À Chandigar (5), il applique le principe des « sept V » composé de sept voies adaptées à l'usage et à la circulation modernes. En préviligiant la vitesse et en évitant les carrefours par des voies en dénivelé, il réduit le réseau viaire à une monofonctionnalité circulatoire avec perte d'orientation et de liens avec le bâti.

La croissance de la motorisation dans les années qui suivent la Seconde Guerre mondiale bouleverse la problématique des villes. En 1969, les voies rapides urbaines (autoroutes urbaines) sont mises en place sur les berges parisiennes. Le boulevard périphérique se substitue aux remparts suivant un schéma circulaire. Dans les années soixante-dix, les rues piétonnes font leur apparition pour restituer le centre des villes aux riverains. Avec l'évolution des différents modes de déplacements (transports en commun, vélos, etc.) surgissent les voies en site propre employées notamment au cœur des « villes nouvelles » (10).

À l'inverse, l'essor de voies mixtes réglementées telles que les zones 30 (limitées à 30 km/h) ou les cours urbaines sont des alternatives à la spécialisation et à l'encombrement de l'espace urbain. 
La réduction du stationnement et de la circulation automobile aux voies urbaines ne peut que réhabiliter les espaces publics pour les citadins. Cependant les habitudes prises par nos concitoyens et les nombreuses activités économiques qui dépendent de l'usage abusif de l'auto constituent une résistance au changement comportemental et économique. Seule une réponse globale dans le temps apportera une amélioration de notre cadre de vie.

V. AVENUE, BOULEVARD, CARREFOUR, COUR, ÎLOT, LOTISSEMENT, ROND-POINT, RUE, RUE PIÉTONNE.

Source: Arturbain.fr
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